Bali Hati
30 septembre 2014

Le soleil est invariablement au rendez vous de 6 heures et à 8, il fait déjà chaud. Avant qu'il n'ait bu la rosée, il est bon d'en faire profiter les pieds. L'occasion de faire un tour de ce jardin où sous les bananiers fleurissent de belles inconnues qui le resteront à part le frangipanier présent partout sur l'île. Les bananiers, au dire d'AGUNG ne donnent un régime qu'une fois, ensuite ils sont coupés.
L'occasion aussi, le temps que tous se réveillent, de se remémorer ce qu'a pu dire AGUNG de son origine royale et de l'organisation politique du pays en république. Le Président vient d' être élu au suffrage universel et bientôt suivra l'élection des députés des 8 départements. Ensuite, ceux-ci et c'est nouveau, devraient élire les gouverneurs des trois provinces. Si les familles royales n'ont plus de rôle politique depuis 1908, elles séjournent toujours dans les palais construits pour eux dont celui de UBUD.



Parlons un peu famille...
Les enfants ont ici invariablement le prénom lié à leur rang de naissance : wayan, l'aîné, le cadet made, le troisième nyoman, et le dernier ketut ou "petite banane", indifféremment nés garçons ou filles. S'il en vient d'autres, la liste est reprise au début. A ces prénoms s'ajoutent des sobriquets : le jour de naissance ou un quelconque mot ou expression sortis de l'imagination des parents. Difficile de répéter l'ensemble du prénom d'AGUNG : il doit presque s'écrire sur deux lignes. Côté mariage, trois jours avant la noce, l'élue rejoint la famille de son mari où elle vivra désormais. Les mariages entre castes se font désormais plus facilement. La fin de vie est marquée par une crémation, haute en couleurs, quelquefois collective car coûteuse pour la famille modeste. Ce qui implique parfois qu'elle se fasse longtemps après la mort.

Après le petit déjeuner a minima : deux toast grillés, confitures et thé ou café, la mer proche appelle à un bain chaud mais hélas rapide. Entre les barques de pêche, l'eau est trop peu profonde et la barrière de corail infranchissable pieds nus sous peine de coupure. La plage est de sable noir, un peu comme toutes les terres d'ici, volcaniques. Une aubaine, avec la chaleur et l'eau abondante, pour des cultures riches



Nous sommes à LOVINA. Avant de filer vers MUNDUK, un encas s'impose. Le warung où nous nous arrêtons est aussi une petite salle de concert. Sur l'estrade est restée la guitare appuyée sur une chaise. Les murs sont décorés de dauphins et d'éléments végétaux aux couleurs tapantes. Au plafond se croisent des tentures bleue et blanche. Il n'y a pas beaucoup de tables dans un espace qui pourrait en contenir trois fois plus. Les tables de bois brut sont solides et sobres. Ce mobilier artisanal presque noble dépareille avec le cadre béton métal très quelconque. Les meubles en bois brut sont de mise partout, signes d'un artisanat local très vivant et d'une matière présente en abondance.




La route vers MUNDUK n'est pas évidente à trouver. Mais il y a toujours du monde à interpeler le long de la route, du monde heureux de rendre service. Elle est aussi étroite, sinueuse et raide, détériorée dans la traversée des villages où sur le trottoir brûlent des sacs de déchets. Une habitude très répandue. Vignes, manguiers, bananiers, cocotiers abondent sur la terre noire et riche. Des cocotiers qui sont les arbres sacrés de l'île car tout est bon dans cet arbre ; le fruit, la coque du fruit pour la sculpture, le bois pour l'oeuvre, les feuilles pour les paniers d'offrande, les déchets pour le feu...et l'ombre pour les touristes marqués par les images convenues des tropiques.


Etape indispensable aux sources d'eau chaude AIR PANNAS à BANJAR. Des eaux sulfurées à presque 40 degrés, dégueulées, c'est le mot, par des figures sculptées incluses dans le mur des bassins où la baignade bienfaitrice se prolonge et d'où nous sortons couverts d'une pellicule jaune...comme le soufre.






L'accès aux bains est jalonné de boutiques colorées où chacun nous fait l'article de sa marchandise de tissus, écharpes, sarong, patchwork, chemises, robes ou maillots. Il faut palabrer, marchander, jusqu'à ce que chacun estime avoir payé ou reçu le compte juste. L'enjeu : comment ne pas dépenser trop tout en faisant que l'artisan gagne sa vie. Pas de sentiments en affaires ? C'est beau de le dire quand s'étale la pauvreté dans chaque village traversé.
Ensuite, des pentes à plus de 20 % suivent la ligne naturelle du terrain accidenté (un peu à l'image du mode de vie des indonésiens : pelan pelan, suivons nos penchants naturels !) et les descentes parfois humides rendent les freins inefficaces. Avec l'altitude, la halte est nécessaire pour se couvrir.




Enfin MUNDUK. Autour, les vallées sont luxuriantes et l'horizon bouché par la brume du soir. C'est de la terrasse d'un warung, à l'étage, que nous vivrons le coucher du soleil en dégustant un goûter. Deux originalités : un "black rice pudding", sorte de soupe sucrée au riz noir, et un pisang quelque chose, beignet de banane cuit à l'eau et couvert de noix de coco. Nostalgie : on faisait en famille dans le nord ce genre de beignet aux pommes cuit à l'eau et nappé de vergeoise brune ou blonde. Cette manière de faire aurait-elle été importée par les colonisateurs bataves, comme les tuiles en forme de vague qu'on voit ici sur les toits et qui sont communes aux Pays Bas et en Belgique ?





La fin de la route jusqu'à UBUD se fera de nuit. Elle est plus large et très vite nous rejoignons la région des lacs où elle s'améliore encore. Le souci est de retrouver les bons chemins de traverse entre tous les axes orientés nord sud vers DENPASAR. Encore une fois, ce sont plus les gens du cru que les panneaux indicateurs qui vont nous donner la solution. En passant, nous tombons sur un bout de circulation alternée : dans le village, la moitié de la route est occupée par des balinais assis et en prière, tenue blanche et udang de rigueur avec le sarong.








Près de l'issue, à MANBA, un marché aux warung ambulants nous séduit par son ambiance festive et vivante. Pisang goreng frits sous nos yeux et nasi goreng arrosés d'un jus d'orange glacé (es jeruk) feront notre repas du soir. Notre jovialité se communique aux habitants qui adorent cette ambiance.
Encore quelques bifurcations à l'intuition et nous reconnaissons UBUD. Comment, je ne sais pas. Plus d'une façon globale que par des détails. Pas la peine de se précipiter sur les ordinateurs en rentrant, le net n'est toujours pas accessible. Pelanpelan, on verra demain.